Sénégal : Macky Sall entre en jeu face à l’accusation de « dette cachée »



2025-10-03 15:33:00

L’ancien président du Sénégal, Macky Sall, est au centre d’une controverse majeure sur son héritage économique.



L’affaire dite de la « dette cachée » secoue le pays depuis la publication d’un audit révélant des écarts significatifs entre les chiffres transmis par son gouvernement et la réalité des finances publiques. Face aux critiques, Macky Sall est sorti de son silence lors d’une conférence organisée par l’Atlantic Council à Washington, où il a rejeté fermement ces accusations.

En septembre 2024, un rapport d’audit sur les finances publiques couvrant la période 2019-2024 a révélé que la dette et le déficit budgétaire du Sénégal étaient bien plus élevés que ce qui avait été officiellement déclaré. Une dette supplémentaire de près de 7 milliards de dollars aurait été dissimulée, selon la Cour des comptes, faisant grimper l’endettement réel à environ 119 % du PIB fin 2024. Le déficit budgétaire réel serait également supérieur à celui présenté par le gouvernement Sall, dépassant parfois 10 % du PIB au lieu des 5 % annoncés. Le FMI a confirmé ces écarts et suspendu le décaissement d’un crédit de 1,8 milliard de dollars tant que les comptes ne sont pas régularisés.

Ces révélations mettent en cause la transparence budgétaire et la crédibilité des chiffres communiqués aux bailleurs internationaux.


Invité à Washington, Macky Sall a balayé d’un revers de main l’idée d’une dette cachée, qu’il qualifie de « non-sens ». Selon lui, une dette publique ne peut pas être dissimulée : elle est encadrée par la BCEAO, validée par des procédures juridiques et contrôlée par la Cour des comptes et l’Assemblée nationale. Les emprunts contractés pendant son mandat étaient destinés à financer des projets structurants (infrastructures, transport, énergie, électrification). Aucune institution de contrôle ne l’a alerté d’anomalies, ce qui prouverait, selon lui, qu’il n’y a pas eu de manœuvres de dissimulation.

Il demande à ce que le rapport final de l’audit soit publié, afin de pouvoir répondre point par point aux accusations. Macky Sall revendique son choix d’une stratégie de développement accéléré, qu’il considère comme un investissement dans l’avenir du Sénégal.

Le ministre de l’Économie, Abdourahmane Sarr, a rapidement répondu à l’ancien président. Il reconnaît que certaines dettes ont pu transiter par des circuits particuliers, mais insiste sur le fait que des décaissements sur ressources extérieures n’ont pas été comptabilisés, ce qui a sous-estimé le déficit réel ; des opérations effectuées à l’étranger ont parfois échappé au circuit classique de la BCEAO et que ces omissions représentent bien une dette non déclarée, qu’il faut désormais assumer auprès des partenaires financiers.

Tout en appelant à la responsabilité, le gouvernement assure que la dette du Sénégal reste soutenable et que le pays garde une marge de manœuvre pour rassurer ses créanciers.

L’affaire de la « dette cachée » est désormais l’un des points de tension les plus vifs de la vie politique sénégalaise. Entre un ancien président qui dénonce une accusation « infondée » et un gouvernement qui affirme vouloir restaurer la vérité des comptes, c’est la crédibilité économique et financière du Sénégal qui est en jeu. La publication du rapport final de l’audit et les décisions à venir du FMI seront déterminantes pour l’avenir du pays et pour l’héritage de Macky Sall.